Les ressources forestières du Cambodge appartiennent à l’état, et sont gérées par deux ministères, à savoir le ministère de l’Agriculture, de la Foresterie et des Pêcheries (MAFF), et le ministère de l’Environnement (MoE). En vertu de la loi de 2002 sur la foresterie, l’Administration forestière (Forestry Administration ou FA) du MAFF est chargée de la gestion durable du domaine forestier permanent du pays, avec pour objectif d’en optimiser les bienfaits sociaux, économiques et environnementaux et de promouvoir les valeurs culturelles du Cambodge. Le terme « domaine forestier permanent » s’entend du complexe forestier global constitué de la réserve forestière permanente et des forêts privées (Preferred by Nature 2020).
Environ 41 % de la surface forestière, constitués de 66 zones protégées associées à des corridors de conservation de la biodiversité, sont en revanche gérés par le ministère de l’Environnement (MoE, 2020). Suite à l’adoption de la loi de 2008 sur les zones protégées, celui-ci est en effet chargé de la gestion, de la conservation de la biodiversité et de l’exploitation durable des ressources naturelles dans les zones protégées.
Terres publiques
Conformément à la loi sur la foresterie de 2002, tous les produits et sous-produits forestiers (ligneux, non ligneux, et de transformation) situés sur et issus de la réserve forestière permanente appartiennent à l’état. Destinés en priorité aux besoins domestiques, ils sont exportés lorsque l’offre est supérieure à la demande locale. Toute personne physique ou morale ou toute communauté souhaitant récolter des produits ou sous-produits forestiers à des fins commerciales doit détenir les permis et documents suivants :
En fonction du potentiel de production, le gouvernement est habilité à allouer une zone de forêt de production à des investisseurs ou à toute entité légale sous la forme d’une concession, sur laquelle la gestion et la récolte des produits et sous-produits forestiers leur sont autorisées. Ces concessions sont attribuées à l’issue d’un processus d’appel d’offres public, et sont régies par la Politique nationale du secteur forestier (National Forest Sector Policy), le Plan national de gestion forestière (National Forest Management Plan), et la Loi sur la foresterie (Forestry Law). Pour récolter des produits et sous-produits forestiers en toute légalité, le concessionnaire doit détenir les documents suivants :
Cependant, en 2002, le gouvernement a annulé tous les accords de concession (OIBT, 2002) et interdit l’exploitation des forêts naturelles, puis suspendu en 2006 l’exportation de bois. Aujourd’hui, la récolte de produits et sous-produits forestiers sur des terres détenue par l’état n’est autorisée que dans l’une des circonstances suivantes :
Concession foncière à des fins économiques (ELC)
Une ELC (pour Economic Land Concession) correspond à l’attribution de terres publiques à des investisseurs à des fins d’exploitation et de développement agricoles et agro-industriels (dont les cultures alimentaires ou industrielles ou les plantations d’arbres) sur moins de 50 ans et une surface inférieure à 10 000 hectares. Les ELC ont été octroyées sur des zones d’exploitation durable dans les zones protégées et dans les forêts de production. Depuis 2012, la délivrance de nouvelles ELC est suspendue, et les ELC existantes font l’objet d’une révision suite à l’arrêté 01BB de 2012, qui établit des mesures de renforcement et d’amélioration de l’efficacité de la gestion des ELC. Les documents suivants conditionnent le droit de récolter légalement du bois dans le cadre d’une ELC :
Concession foncière à des fins sociales
Les terres détenues par l’état peuvent être allouées à des familles dans le besoin, des personnes victimes de catastrophes naturelles ou des militaires démobilisés en vertu du sous-décret no 19 sur les Concessions foncières à des fins sociales (Social Land Concessions). C’est au ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Urbanisme et de la Construction (Ministry of Land Management, Urban Planning and Construction) qu’il revient de traiter ces demandes de concession. En cas d’avis favorable, la zone est susceptible d’être défrichée par un commissaire-priseur après l’établissement d’un inventaire forestier par l’Administration forestière. Des permis de récolte et de transport sont dans ce cas requis. Après cinq ans d’occupation et d’utilisation des terres allouées, les familles sont en droit d’en demander la propriété au ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Urbanisme et de la Construction.
Développement d’infrastructure
La récolte du bois et autorisée dans le cadre du développement d’infrastructures moyennant l’obtention des documents suivants :
Terres privées
Les terres privées sont en général détenues par des individus ou des entreprises privées. Le ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Urbanisme et de la Construction est l’autorité responsable de l’attribution des terres privées, que leurs propriétaires sont autorisés à exploiter et développer. Ce droit s’étend également à la gestion, le développement, l’usage, la vente et la distribution de produits et sous-produits forestiers (loi de 2002 sur la foresterie). Les terres privées, dont les forêts et plantations d’arbres privées, sont classées selon leur taille : petite, moyenne et grande. Les petites plantations d’arbres comprennent les terrains familiaux (moins de 10 hectares) et les petites plantations (10-100 hectares). Les plantations à moyenne et grande échelle (respectivement entre 100 et 1 000 hectares et plus de 1 000 hectares) sont en général détenues et gérées par des entreprises privées.
Un certificat d’enregistrement est requis pour toutes les terres privées. Ces certificats sont délivrés par le Département provincial de l’agriculture, de la foresterie et des pêcheries (Provincial Department of Agriculture, Forestry and Fisheries) pour les petites plantations, l’Administration forestière pour les plantations moyennes, et le ministère de l’Agriculture pour les grandes. Les produits issus de forêts privées ou de plantations d’arbres ne nécessitent pas de permis d’exploitation, de permis de licence ou de PC pour leur transport. Leur exportation et transformation sont en revanche soumise à autorisation, délivrée par le ministère du Commerce en collaboration avec l’Administration forestière (MAFF, 2017).
Forêts communautaires
Les communautés locales jouissent du droit d’usage coutumier des produits et sous-produits forestiers et peuvent contribuer à la gestion forestière par le biais de forêts communautaires. Toutes les forêts communautaires doivent recevoir l’aval et la reconnaissance du ministère de l’Agriculture, de la Foresterie et des Pêcheries, délivré sur la base d’une proposition émise par le Cantonnement d’administration forestière. En forêt communautaire, l’exploitation est soumise à l’approbation par le Cantonnement d’administration forestière d’un accord de foresterie communautaire et d’un plan de gestion forestière signés par la communauté. Celle-ci détient alors le droit de récolter les produits et sous-produits forestiers aux termes établis dans son plan de gestion forestière et l’accord de foresterie communautaire.
Les communautés sont également autorisées à récolter les produits et sous-produits de leur forêt à des fins commerciales sur autorisation du ministère de l’Agriculture, de la Foresterie et des Pêcheries et moyennant un permis de récolte délivré par l’Administration forestière. Des primes et redevances, fixées conjointement par le ministère de l’Agriculture, de la Foresterie et des Pêcheries et le ministère de l’Économie et des Finances, sont dans ce cas dues. Il est interdit par la loi à la communauté de faire usage de la forêt communautaire en tant que concession, de la vendre, de la troquer ou de la transférer à un tiers. À ce jour, 636 forêts communautaires couvrant une surface d’environ 516 817 hectares ont été établies, dont 484 ont reçu l’aval officiel du MAFF (FA, 2018).
Les personnes physiques ou morales qui récoltent des produits et sous-produits à des fins commerciales sur des domaines forestiers permanents sont redevables de primes et redevances au trésor public collectées par l’Administration forestière (art. 52 de la loi sur la foresterie). La délivrance du permis de récolte est en outre conditionnée au versement d’une caution garantissant le paiement des redevances et primes, dont le montant est établi sur la base du quota de récolte annuel. Aucune redevance ou prime n’est en revanche due sur les produits issus des forêts privées et communautaires. La taxe à l’exportation et autres droits doivent être versés au trésor public avant toute exportation.
L’ensemble des activités d’exploitation forestière en forêts naturelles est régi par l’Administration forestière. Celles-ci ne sont autorisées que sur les concessions forestières ou les ELC. L’octroi par le gouvernement du droit légal d’exploitation dans ces zones est conditionné au respect de toutes les exigences suivantes :
Une fois les droits d’exploitation accordés par le gouvernement, l’entreprise doit demander une lettre de permission au ministère de l’Agriculture, de la Foresterie et des Pêcheries, ainsi qu’une liste d’inventaire forestier établie par la Division d’administration forestière avant de démarrer toute opération dans la zone proposée. Cette autorisation obtenue, l’entreprise doit s’acquitter des redevances et primes dues pour être autorisée à défricher ou exploiter le bloc forestier approuvé. L’ensemble du matériel et des installations utilisés dans le cadre des opérations d’exploitation doit être enregistré auprès de l’Administration forestière. Après l’abattage, tout le bois doit être mesuré, marqué avec un marteau et recensé dans un registre appelé « Log Book A » par l’Administration forestière. Celle-ci approuve le registre, et délivre alors un Permis de licence et ajoute trois marques supplémentaires au marteau à chaque grume pour permettre à l’entreprise d’utiliser le bois.
Aujourd’hui, le bois est principalement exploité dans des forêts privées. Pour récolter du bois dans des forêts privées et des plantations d’arbres, leurs propriétaires doivent enregistrer la quantité et la qualité des produits et sous-produits forestiers dans le Log Book A (délivré par la Division de l’administration forestière). Les permis de récolte et de transport ne sont pas requis.
La loi sur la foresterie reconnaît les communautés locales, et garantit leurs droits d’usage traditionnels, conformes à leurs coutumes, croyances, religions, et modes de vie. Dans les concessions forestières, les concessionnaires sont tenus de veiller à ce que leurs activités n’empiètent pas sur les droits d’usage coutumiers lorsqu’elles ont lieu sur des terres appartenant à des communautés autochtones, ni sur les droits d’accès et d’usage des communautés résidant sur ou à proximité des concessions forestières. La communauté peut se voir octroyer une zone forestière par le biais d’un accord de foresterie communautaire valide pour 15 ans, approuvé par l’Administration forestière.
Dans l’ensemble, les produits forestiers sont convertis et transportés localement par des entreprises privées sur autorisation de l’Administration forestière. Suite à une interdiction prononcée au sous-décret 131, seuls les produits forestiers de transformation issus de l’exploitation légale de forêts naturelles comme le mobilier, le contreplaqué, et les feuilles de placage peuvent être exportés. L’exportation de grumes et de bois de sciage est interdite. Pour transporter le bois du lieu d’abattage à l’usine, l’entreprise doit détenir un permis dit « PC-1 », délivré par la Division de l’administration forestière. Celui-ci contient des informations sommaires sur le volume de bois transporté en fonction du permis de licence et du camion spécifique utilisé pour l’acheminer. Le propriétaire de l’usine doit consigner dans un registre l’ensemble des produits qui entrent et sortent du site. Le bois et les produits de transformation destinés à être transportés vers des marchés locaux doivent être accompagnés d’un PC-2, délivré par la Division d’administration forestière.
Pour être autorisée à exporter des produits forestiers de transformation, une entreprise doit obtenir un permis d’exportation de la part du ministère du Commerce, et respecter les quotas annuels fixés par le gouvernement. Ce permis est délivré moyennant présentation de divers documents (document de taxe professionnelle, bon de commande, facture, bordereau d’expédition, lettre de quota). Un quota annuel n’est pas nécessaire pour les forêts privées et communautaires. Le permis d’exportation est délivré par l’Administration forestière en collaboration avec le ministère du Commerce.
Préalablement à leur transport, les produits sont envoyés dans un dépôt et site d’entreposage des douanes, où ils sont inspectés et scellés par un agent de l’Administration forestière. Un certificat d’autorisation (PC-IMEX) est nécessaire pour transporter les produits de l’entreprise au site des douanes pour exportation. L’inspection par les douanes a lieu avant le chargement du conteneur, dans le cadre des opérations de dédouanement. Un permis d’exportation doit être délivré par le Département général des douanes et de l’accise pour chaque expédition. Les documents d’exportation, dont la licence d’exportation, le PC-IMEX, le permis d’exportation, la facture commerciale et le bordereau d’expédition, sont requis par les douanes avant le scellement du conteneur pour exportation.